Toutes ces réponses ne manquent pas d'intérêt et mériteraient l'engagement d'un dialogue, c'est certain, mais j'aimerais juste revenir sur l'idée qu'il s'agit d'une expérience un peu factice, comme lorsqu'on isole des particules en laboratoires pour étudier leur comportement de manière précise. Évidemment, le premier mouvement est peut-être de rejeter la question parce qu'on n'adhère pas à ce qu'elle implique. Mais j'aimerais savoir ce que vous en pensez, pour qui visiblement il y a un dessein, une destinée humaine et supra-humaine, ou d'autres qui ont témoignés d'une connaissance de leurs vies antérieures et semblent ainsi donner du poids à l'idée effective de transmigration. Pour ceux-là, et pour ceux qui voudraient partager par la pensée leurs croyances/expériences, la question de moksha (délivrance de la chaîne transmigratoire) peut avoir un sens.
Micka a écrit :Je pense que ceux qui désirent réellement s'abolir dans le Brahman, sont tout simplement ceux qui peuvent s'oter la vie là maintenant, sans regret, sans désir. Mourrir comme on jette un cailloux, disparaitre.
Pour mon cas perso, donc

, non je ne suis pas spécialement disposer a disparaitre a la fin de ce message.
Pas forcément. Dans l'anthropologie de l'hindouisme, on distingue plusieurs buts (en fait, quatre, si l'on veut schématiser : le pouvoir/richesse (artha), kâma (l'amour, la dimension charnelle), dharma (l'ordre, l'harmonie, la "loi"), la libération (moksha), et dans les visions traditionnelles, cela pouvait se mettre en relation avec les âges de la vie. Donc, on peut actuellement penser que l'on a encore quelque chose à accomplir de manière mondaine tout en aspirant à une libération post-mortem.
Morgan a écrit :Le problème, c'est que ta question démarre à partir de pré-supposés.
La supposition d'un esclavage, la supposition d'une libération.
Oui, je fais clairement appel à des présupposés que l'on peut trouver dans les textes et dans des enseignements dans lesquels existent l'équation existence=souffrance.
Morgan a écrit :Quand les loustics sortent de la matrice dans le film, qu'est ce qu'ils font? Ils se posent tranquillement dans le vide sidéral? Non, ils évoluent dans le vaisseau, et aide à l'édification et à la protection de Sion.
Intéressant emprunt à Matrix qui justement joue sur le questionnement à propos du réel. L'architecte est-il vraiment réel lorsqu'il reçoit Néo ? Laquelle des pilules délivrent vraiment de l'illusion ?
Mais admettons que ceux qui sortent de la matrice (sans vraiment en sortir, à l'image des gigognes) soient de modernes jîvanmukta. Cela sous-entend-il que pour toi, l'extinction dans le brahman n'en est pas vraiment une ? Qu'il reste toujours quelque chose à faire (une trinité acteur-action-actionné), ce qui ouvre sur des "arrières-monde" (j'ai bien lu que tu as ajouté "vocation imagée"

)
Voir l'extinction de l'individu comme une chose terrible et vide de sens, un arrêt, est une peur primaire venant de notre instinct animal.
Oui, nous passons une partie variable de notre existence (ou toute notre existence

) à vivre dans le déni de notre mortalité, réflexe bien connu des psychanalystes.
Un jour, j'ai parlé à mon enseignant de ma peur de la mort. Il l'a balayé sans théâtralité, comme si j'évoquais une banalité sans importance (ce qu'elle était, de fait). J'ai été déstabilisé puis allégé, soulagé que quelqu'un me mette devant une sorte de "so what ?".
S'il n'y a plus d'égo, quel est le problème de le laisser vivre ou mourir?
Certes. Mais n'y a-t-il plus d'ego pour celui qui accumule les pratiques dans le but d'échapper à la ronde transmigratoire ?