Samadhi Pada - Sutra 1
Posté : 07 mai 2024, 20:42
I. - Voici l'enseignement traditionnel du Yoga
En tant qu'occidentaux, ce préambule peut nous sembler purement formel, dans la mesure où il introduit les Yogas Sutras. Est-ce simplement cela ?
Des milliers de personnes ont depuis deux mille ans étudié les YS. Certains étaient des Maîtres spirituels de Haut Niveau, dépositaires d'une expérience spirituelle efficiente qu'ils transmettaient en s'appuyant sur cette synthèse magistrale que sont les YS, d'autre des disciples qui trouvaient dans ce texte une sorte de manuel sur lequel s'articulait l'enseignement de leur Maître et qui devait alimenter leur pratique personnelle. Pour d'autres enfin la lecture de ce texte fut un choc, un appel, une révélation entrouvrant la porte vers un monde à la fois nouveau et familier, le sentiment que se dévoilait devant eux le chemin que tout leur être cherchait et qui les ramenait surement vers une plénitude inaliénable.
Entreprenant ensemble cette étude, nous mettons nos pas dans les leurs, nous parcourons avec humilité des sentiers qu'ils ont défriché mais aussi le désir de participer en y apportant notre pratique, si modeste soit elle.
Il est possible de parcourir ce texte comme on parcourt un beau paysage, en détaillant l'histoire et la géographie et en analysant finement chacune de ses étapes. On peut étudier et compiler la multitude des commentaires qu'il a suscité, ou alors cheminer avec Patanjali et tous ceux qui nous ont précédé sur ce sentier, en lui posant à chaque étape les questions qui nous tiennent à cœur "où veut il en venir?", "que signifie pour moi, dans ma pratique cet aspect de l'enseignement?" , "comment les Ys peuvent-ils enrichir mon itinéraire intérieur?", "ou me mènent ils?".
Si nous acceptons ainsi de nous mettre en chemin, et de laisser au début du voyage certains des bagages trop encombrants qui peuvent faire partie de notre confort spirituel et mental, il est possible que notre monde intérieur en soit chamboulé, mais il en sera finalement régénéré.
Les YS ne sont pas une usine à concepts. Ce que Patanjali expose, ce sont des outils, articulés autour d'une pratique. Si les exégètes ont perçu dans la succession des quatre chapitres des ruptures, voire des contradictions, c'est bien parce qu'il cherche à donner au Yogi des moyens de parcourir la route qui mène à la délivrance – Kaivalya. Un exposé spéculatif peut se dérouler comme un bel ouvrage, satisfaisant notre besoin d'ordre et de rationalité, mais toute pratique, confrontée aux incessants changements d'une genèse intérieure se doit de s'adapter sans pour autant perdre de vue son objectif. L'exposé rigoureux d'un concept central comme les Kleishas est tout autant une carte précise de la genèse des phénomènes qui structurent et affectent notre monde intérieur qu'une thérapie, un chemin vers la délivrance. Deux millénaires avant la découverte de la psychanalyse, les YS interpellent par la lucidité et la précision de leur cartographie des mécanismes et des conditionnements qui nous imposent leur loi. Mais pour Patanjali la découverte et la résorption progressive des ces conditionnement révèle la réalité de notre être, la conscience pure, le voyant des Ys, l'Atman du Vedanta.
A la fameuse phrase de Freud "nous ne sommes pas maître dans notre maison" les YS répondent qu'après avoir dissout nos conditionnements nous serons "installés dans notre propre demeure".
En fonction de notre pratique certains sutras nous sembleront évidents, parfois trop, d'autres abrupts et nous craindrons parfois de perdre le fil d'ariane que tisse ce merveilleux architecte dans un cheminement qui, s'il n'est pas linéaire, s'articule cependant sur une cohérence forte. Ce que nous entreprenons est un partage, dans lequel aucune contribution n'est vaine, inopportune ou inutile, pourvu qu'elle exprime avec sincérité, ce que nous inspire cette lecture.
Pour illustrer cette continuité, ce courant spirituel qui infuse ce texte inspirant, je présenterais deux mantras que Maitre et disciples récitent dans la pratique traditionnelle de l'Ashtang Yoga de Patanjali. L'un avant de commencer la séance de yoga et l'autre à la fin de la pratique.
Le mantra d'introduction :
"Om
Vande Guranam charanaravinde
Sandarshita svatmasukavabodhe
Nishreyase jangalikayamane
Samsara halahala mohashantyai
Abahu purushakaram
Shankhacakrsi dharinam
Sahasrara siram svetam
Prânamami patanjalim
Om
A-O-M. Le sens symbolique du Om est la réalisation de soi
- Vande Guranam charanaravinde : Je m'incline aux pieds du gourou
Dans la tradition indienne, c'est très courant de commencer une allocution en remerciant la source de la sagesse qui nous est transmise. C'est faire preuve d'humilité mais aussi une manière de recevoir la bénédiction du maître et de manifester la confiance et la diligence avec laquelle nous abordons la pratique. Les "pieds du gourou" sont un symbole de l'ancrage fort, de la gravité dans le sens du magnétisme fort de l'enseignement du maître. L'hommage rendu s'adresse à la tradition d'enseignement comme aux instructeurs et aux maîtres qui nous ont guidés et plus globalement à notre pratique assidue du yoga (sadhana).
- Sandarsita Svatma Sukhava Bodhe : ... qui révèle la joie de l'existence pure. On nous rappelle ici le but ultime du yoga : réaliser (bodhe, celui qui sait) notre véritable essence (Svatma : Soi).
- Nih Sreyase Jangalika mane..qui est le guérisseur. La pratique du yoga a le pouvoir de nous guérir du poison en nous : l'ignorance
- Samsara Halahala Mohasantyai... grâce à qui nous amoindrissons l'effet du poison de l'ignorance qui tient notre esprit prisonnier d'une existence conditionnée. Samsara fait référence à nos habitudes, à ces schémas répétitifs qui nous limitent dans notre pratique et dans nos vies. Le samsara a pour effet de nous bercer d'illusions néfastes (halahala). Dans la mythologie indienne, halahala est apparu à la surface des océans lorsque les dieux les ont remués - représentation symbolique des pratiques de purification des yogis. Les dieux impuissants ont vu tout ce halhala se déverser sur les plages et ne savaient pas quoi en faire. Shiva, le Gourou des gourous est alors apparu et l'a bu. Le poison a coloré son corps en bleu.
-Abahu Purusakam Patanjalim. Je m'incline devant le sage Patanjali, l'une des incarnations d'Adisesa. Ici nous rendons hommage à Patanjali, celui qui a retranscrit les enseignements du Yoga dans les Yoga Sutras. Par cet hommage, nous manifestons notre reconnaissance au Yoga comme enseignement spirituel et principe de transformation. Dans la mythologie indienne, Patanjali est considéré comme l'une des incarnations du seigneur des serpents, Adisesa
- Sankhacakrasi Dharinam Sahasrara Siranam Svegam. .. qui a forme humaine jusqu'aux épaules, est tout blanc, avec 1000 têtes lumineuses, qui porte une épée, un disque et une conque. Cette description est une succession d'attributs de Patanjali. La couleur blanche (svetum) est symbole de pureté, les 1000 (sahasrara) têtes lumineuses (sirasam) sont l’illustration de l'éveil de Patanjali, l'épée est le symbole de la discrimination, le disque (cakra) représente le temps infini et la conque, le son divin
- Prânamami Patanjalim Om ... Je me prosterne devant lui
Mantra de clôture
Om
Swasthi-praja bhyah pari pala yantam
Nya-yena margenas mahi-mahishaha
Go-brahmanebhyaha - shubamastu-nityam
Lokaaa-samastha sukhino-bhaavantu
Om
Om shanti, shanti, shanti
Ce mantra rappelle que si notre cheminement repose sur un travail personnel, nous demeurons solidaires de l'humanité. La traduction se suffira à elle-même :
Om
Que l’humanité se porte bien
Que les dirigeants du monde protègent avec justice
Que soient bénis ceux qui savent que la Terre est un endroit sacré
Que tous les êtres humains soient heureux et prospères.
Om paix, paix, paix
En tant qu'occidentaux, ce préambule peut nous sembler purement formel, dans la mesure où il introduit les Yogas Sutras. Est-ce simplement cela ?
Des milliers de personnes ont depuis deux mille ans étudié les YS. Certains étaient des Maîtres spirituels de Haut Niveau, dépositaires d'une expérience spirituelle efficiente qu'ils transmettaient en s'appuyant sur cette synthèse magistrale que sont les YS, d'autre des disciples qui trouvaient dans ce texte une sorte de manuel sur lequel s'articulait l'enseignement de leur Maître et qui devait alimenter leur pratique personnelle. Pour d'autres enfin la lecture de ce texte fut un choc, un appel, une révélation entrouvrant la porte vers un monde à la fois nouveau et familier, le sentiment que se dévoilait devant eux le chemin que tout leur être cherchait et qui les ramenait surement vers une plénitude inaliénable.
Entreprenant ensemble cette étude, nous mettons nos pas dans les leurs, nous parcourons avec humilité des sentiers qu'ils ont défriché mais aussi le désir de participer en y apportant notre pratique, si modeste soit elle.
Il est possible de parcourir ce texte comme on parcourt un beau paysage, en détaillant l'histoire et la géographie et en analysant finement chacune de ses étapes. On peut étudier et compiler la multitude des commentaires qu'il a suscité, ou alors cheminer avec Patanjali et tous ceux qui nous ont précédé sur ce sentier, en lui posant à chaque étape les questions qui nous tiennent à cœur "où veut il en venir?", "que signifie pour moi, dans ma pratique cet aspect de l'enseignement?" , "comment les Ys peuvent-ils enrichir mon itinéraire intérieur?", "ou me mènent ils?".
Si nous acceptons ainsi de nous mettre en chemin, et de laisser au début du voyage certains des bagages trop encombrants qui peuvent faire partie de notre confort spirituel et mental, il est possible que notre monde intérieur en soit chamboulé, mais il en sera finalement régénéré.
Les YS ne sont pas une usine à concepts. Ce que Patanjali expose, ce sont des outils, articulés autour d'une pratique. Si les exégètes ont perçu dans la succession des quatre chapitres des ruptures, voire des contradictions, c'est bien parce qu'il cherche à donner au Yogi des moyens de parcourir la route qui mène à la délivrance – Kaivalya. Un exposé spéculatif peut se dérouler comme un bel ouvrage, satisfaisant notre besoin d'ordre et de rationalité, mais toute pratique, confrontée aux incessants changements d'une genèse intérieure se doit de s'adapter sans pour autant perdre de vue son objectif. L'exposé rigoureux d'un concept central comme les Kleishas est tout autant une carte précise de la genèse des phénomènes qui structurent et affectent notre monde intérieur qu'une thérapie, un chemin vers la délivrance. Deux millénaires avant la découverte de la psychanalyse, les YS interpellent par la lucidité et la précision de leur cartographie des mécanismes et des conditionnements qui nous imposent leur loi. Mais pour Patanjali la découverte et la résorption progressive des ces conditionnement révèle la réalité de notre être, la conscience pure, le voyant des Ys, l'Atman du Vedanta.
A la fameuse phrase de Freud "nous ne sommes pas maître dans notre maison" les YS répondent qu'après avoir dissout nos conditionnements nous serons "installés dans notre propre demeure".
En fonction de notre pratique certains sutras nous sembleront évidents, parfois trop, d'autres abrupts et nous craindrons parfois de perdre le fil d'ariane que tisse ce merveilleux architecte dans un cheminement qui, s'il n'est pas linéaire, s'articule cependant sur une cohérence forte. Ce que nous entreprenons est un partage, dans lequel aucune contribution n'est vaine, inopportune ou inutile, pourvu qu'elle exprime avec sincérité, ce que nous inspire cette lecture.
Pour illustrer cette continuité, ce courant spirituel qui infuse ce texte inspirant, je présenterais deux mantras que Maitre et disciples récitent dans la pratique traditionnelle de l'Ashtang Yoga de Patanjali. L'un avant de commencer la séance de yoga et l'autre à la fin de la pratique.
Le mantra d'introduction :
"Om
Vande Guranam charanaravinde
Sandarshita svatmasukavabodhe
Nishreyase jangalikayamane
Samsara halahala mohashantyai
Abahu purushakaram
Shankhacakrsi dharinam
Sahasrara siram svetam
Prânamami patanjalim
Om
A-O-M. Le sens symbolique du Om est la réalisation de soi
- Vande Guranam charanaravinde : Je m'incline aux pieds du gourou
Dans la tradition indienne, c'est très courant de commencer une allocution en remerciant la source de la sagesse qui nous est transmise. C'est faire preuve d'humilité mais aussi une manière de recevoir la bénédiction du maître et de manifester la confiance et la diligence avec laquelle nous abordons la pratique. Les "pieds du gourou" sont un symbole de l'ancrage fort, de la gravité dans le sens du magnétisme fort de l'enseignement du maître. L'hommage rendu s'adresse à la tradition d'enseignement comme aux instructeurs et aux maîtres qui nous ont guidés et plus globalement à notre pratique assidue du yoga (sadhana).
- Sandarsita Svatma Sukhava Bodhe : ... qui révèle la joie de l'existence pure. On nous rappelle ici le but ultime du yoga : réaliser (bodhe, celui qui sait) notre véritable essence (Svatma : Soi).
- Nih Sreyase Jangalika mane..qui est le guérisseur. La pratique du yoga a le pouvoir de nous guérir du poison en nous : l'ignorance
- Samsara Halahala Mohasantyai... grâce à qui nous amoindrissons l'effet du poison de l'ignorance qui tient notre esprit prisonnier d'une existence conditionnée. Samsara fait référence à nos habitudes, à ces schémas répétitifs qui nous limitent dans notre pratique et dans nos vies. Le samsara a pour effet de nous bercer d'illusions néfastes (halahala). Dans la mythologie indienne, halahala est apparu à la surface des océans lorsque les dieux les ont remués - représentation symbolique des pratiques de purification des yogis. Les dieux impuissants ont vu tout ce halhala se déverser sur les plages et ne savaient pas quoi en faire. Shiva, le Gourou des gourous est alors apparu et l'a bu. Le poison a coloré son corps en bleu.
-Abahu Purusakam Patanjalim. Je m'incline devant le sage Patanjali, l'une des incarnations d'Adisesa. Ici nous rendons hommage à Patanjali, celui qui a retranscrit les enseignements du Yoga dans les Yoga Sutras. Par cet hommage, nous manifestons notre reconnaissance au Yoga comme enseignement spirituel et principe de transformation. Dans la mythologie indienne, Patanjali est considéré comme l'une des incarnations du seigneur des serpents, Adisesa
- Sankhacakrasi Dharinam Sahasrara Siranam Svegam. .. qui a forme humaine jusqu'aux épaules, est tout blanc, avec 1000 têtes lumineuses, qui porte une épée, un disque et une conque. Cette description est une succession d'attributs de Patanjali. La couleur blanche (svetum) est symbole de pureté, les 1000 (sahasrara) têtes lumineuses (sirasam) sont l’illustration de l'éveil de Patanjali, l'épée est le symbole de la discrimination, le disque (cakra) représente le temps infini et la conque, le son divin
- Prânamami Patanjalim Om ... Je me prosterne devant lui
Mantra de clôture
Om
Swasthi-praja bhyah pari pala yantam
Nya-yena margenas mahi-mahishaha
Go-brahmanebhyaha - shubamastu-nityam
Lokaaa-samastha sukhino-bhaavantu
Om
Om shanti, shanti, shanti
Ce mantra rappelle que si notre cheminement repose sur un travail personnel, nous demeurons solidaires de l'humanité. La traduction se suffira à elle-même :
Om
Que l’humanité se porte bien
Que les dirigeants du monde protègent avec justice
Que soient bénis ceux qui savent que la Terre est un endroit sacré
Que tous les êtres humains soient heureux et prospères.
Om paix, paix, paix