
Je reprends un texte mis à disposition par Odile dans l'étude de Samkhya
http://www.pratique-du-yoga.com/forum/v ... =37&t=2650
Tout d'abord, Odile, si je puis me permettre, je trouve cette vision très prodonde.
Peut-être aurait-il mieux fallut parler de cela ici plûtot que dans l'étude du Samkhya qui semble se limiter au seul Samkhya...
Du moins à une interprétation très strict et rigoureuses des Tattvas...
Odile :
Bon, je vais commencer par une citation de Milarepa : « Il vous faut savoir que toutes les apparences sont dans la nature de l'esprit, et que l'esprit est par nature vacuité »...cela signifie que tout « être » est constitué d'une combinaison intérieure de 5 agrégats qui sont en perpétuel changement...et c'est cet ensemble d'agrégats qui nous fait penser qu'il existe « un soi »...Si nous n'étions pas constitués de ces 5 agrégats, le monde, toutes les apparences extérieures ne nous « toucheraient pas », c'est-à-dire, qu'il n'y aurait aucun lien de nuisance ou de bénéfice, et c'est donc par rapport à ces perceptions établies par nos organes des sens qu'apparaissent toutes les manifestations extérieures, alors qu'en réalité, elles sont dépourvues ou vides « d'existence vraie »...comme le monde des rêves...quand nous rêvons d'une personne ou d'un animal, par exemple, celui-ci apparaît nettement dans ses moindre détails, : nous pouvons le voir, le ressentir, le toucher, l'entendre, lui parler, etc..., et lorsque nous nous réveillons, pffft, tout disparaît, et sans nous demander un instant « mais ou est passée cette personne ou cet animal ? » parce que nous comprenons que c'était une simple projection de notre esprit, sans aucune existence en dehors de notre esprit. Au moment où la perception du rêve qui appréhendait la personne cesse, cette personne ou cet animal ne va nulle part, il disparaît tout simplement...Le monde dont nous faisons l'expérience à l'état de veille et le monde dont nous faisons l'expérience lorsque nous rêvons sont tous deux de simples apparences à l'esprit qui proviennent de nos conceptions erronées : si nous affirmons que le monde à l'état de veille est vrai, alors nous devons également affirmer que le monde des rêves est vrai, car entre les deux, il n'y a qu'une seule différence : le monde des rêves est une apparence à notre esprit subtil du rêve, alors que le monde à l'état de veille est une apparence à notre esprit grossier de l'état de veille. Le monde de nos rêves n'existe que pendant la durée de la perception du rêve à laquelle il apparaît, et le monde de l'état de veille n'existe que pendant la durée de la perception à l'état de veille à laquelle il apparaît...Au moment de notre mort, notre esprit grossier de l'état de veille se dissolve dans notre esprit très subtil, et le monde que nous connaissions lorsque nous étions en vie disparaît tout simplement...Le monde tel que les autres le perçoivent continuera, mais notre monde personnel disparaîtra aussi totalement et irrévocablement que le monde du rêve de la nuit dernière...
LES 5 AGREGATS :
I – La matière : cet agrégat comprend les 4 éléments fondamentaux qui sont la terre, l'eau, le feu et l'air, ainsi que leurs différents états et leurs dérivés. Les dérivés sont les instruments sensoriels : la vue, l'ouïe, l'odorat, le toucher, le goût, et leur correspondance dans le monde : les formes visibles, les sons, les odeurs, les contacts physiques avec le corps, les goûts, mais également les objets mentaux : les idées, pensées et conceptions. Le domaine entier de la matière est englobé dans cet agrégat.
II – Les sensations : cet agrégat comprend les sensations agréables, douloureuses et neutres qui possèdent 6 catégories : 1) le contact de la vue avec les objets visibles, 2) le contact de l'ouïe avec les sons, 3) le contact de l'odorat avec les odeurs, 4) le contact de la gustation avec les goûts, 5) le contact du corps avec les objets tangibles, 6) l'organe mental avec les pensées.
L'organe mental (appelé Manas) n'est pas l'esprit par opposition à la matière, mais une faculté au même titre que l'oeil, l'oreille, etc...Si l'oeil perçoit le monde des couleurs et des formes visibles, l'organe mental perçoit le monde des idées, des pensées qui sont des objets mentaux. Les idées, les pensées ne sont pas indépendantes du monde extérieur dont les 5 facultés physiques font l'expérience, mais dépendent des expériences physiques et sont conditionnées par celles-ci.
Par exemple, une personne qui nait sourde ou aveugle ne peut pas se faire « une idée » des sons ou des couleurs, sauf par des analogies autres éprouvées par d'autres facultés. Les idées et les pensées sont donc conçues par l'organe mental.
III – Les perceptions : cet agrégat correspond à l'identification conceptuelle ou non-conceptuelle des 6 catégories de sensations de manière étendue, faible ou incommensurable. Il y a 6 catégories de perceptions correspondant aux 6 catégories de sensations et sont en relation avec nos 5 facultés sensoriels et l'organe mental. Ce sont les perceptions qui reconnaissent les objets extérieurs et mentaux. Par exemple, lorsque l'oeil entre en contact avec la couleur verte, c'est la perception qui « reconnaît que la couleur est verte ».
IV – Les formations mentales : cet agrégat comprend les formations mentales et les actions. Il y a un lien entre les formations mentales et les actions qui ont une influence karmique : ce sont les actes volitionnels ou volontaires. La volition est l'activité mentale qui dirige nos actes et selon leurs portées bonnes, mauvaises ou neutres, cette action volontaire entraine un bon ou un mauvais karma.
La volition possède également 6 catégories, tout comme les 6 sensations et les 6 perceptions, avec une différence importante : les sensations et les perceptions ne sont pas des actes volontaires et n'ont pas d'effet karmique, seules les actions volontaires possèdent cet effet : la détermination, l'attention, la confiance, la concentration, la sagesse, l'amour, le désir, la haine, la jalousie, la vanité, l'ignorance, la rancune, etc...
Il y a un dénombrement de 53 formations mentales :
1) 5 formations mentales omniprésentes : la sensation, la perception, l'intention, le contact, la concentration de l'attention.
2) 6 formations mentales déterminantes : l'aspiration, la croyance, l'attention, la mémoire, la stabilisation, la connaissance supérieure.
3) 11 formations mentales positives : la confiance, la honte de soi (par rapport à une culpabilité), le respect humain, le détachement, l'absence de haine, l'absence de confusion, l'effort joyeux, la souplesse d'esprit, l'assiduité, l'équanimité, la non-nocivité.
4) 6 souillures mentales fondamentales : l'aversion, le désir, l'orgueil, l'ignorance, le doute, la vue erronée.
5) 21 souillures secondaires : la colère, la jalousie, la rancune, la dissimulation, la jalousie, la malveillance, la tromperie, l'avarice, la malhonnêteté, la suffisance, l'absence de honte (par rapport à une culpabilité), la nocivité, l'absence de respect, la léthargie, l'agitation, l'absence de confiance, la paresse, l'indolence, l'oubli, la distraction, l'absence d'introspection.
6) 4 formations mentales variables : le sommeil, le regret, l'examen, l'analyse.
V – La conscience : cet agrégat comprend les états de conscience qui ont pour origine les 5 facultés sensoriels et l'organe mental (pensée), et pour objet les formes du monde physique : formes visibles, objets mentaux, les choses tangibles, les sons, odeurs et saveurs.
Par exemple, la conscience visuelle a pour origine l'oeil, et pour objet, la forme visuelle. La conscience mentale a pour origine l'organe mental, et pour objet, l'idée ou la pensée, etc....
La conscience est une réponse ou une connaissance qui a pour base l'une des 6 facultés, et pour objet, un des phénomènes extérieurs correspondant (formes visibles, sons, etc...).
La conscience n'a pas la capacité de reconnaître un objet particulier en tant que tel. Elle est seulement le fait d'avoir connaissance de la présence de l'objet. Lorsque l'oeil entre en contact avec la couleur verte, la conscience visuelle note la présence d'une couleur, mais elle ne reconnaît pas que cette couleur est verte. Il n'existe pas de reconnaissance à ce stade, la faculté qui reconnaît et identifie la couleur est le 3ème agrégat, la perception. L'agrégat de consciences est seulement la connaissance de l'expérience sensorielle naissant d'instant en d'instant aux portes des sens. Ces expériences ne sont pas immuables, même durant 2 instants consécutifs, mais forment un flux et un reflux survenant et disparaissant continuellement.
La conscience n'est pas une entité permanente qui serait à l'opposé de la matière. Il y a donc 6 catégories de consciences en relation avec les 6 bases internes et les 6 catégories d'objets externes.
Le Bouddhisme montre qu'il n'y a pas de « soi », la conscience a pour cause la condition dans laquelle elle prend naissance, mais n'a pas d'existence propre ou de « soi » permanent...
Dès que nous venons au monde, il y a un attachement à ce « soi » que nous pensons autonome...mais ce « soi » ne fait pas partie des agrégats : si une partie de mon corps, peu importe laquelle, est coupée, je ne trouverai pas un « soi » dedans...en même temps, nous ne pouvons pas dire que le « soi » est complètement différent des agrégats parce que ces agrégats vivent à travers ce « soi »...
Si le « soi » existe, il apparaîtrait dans l'une des 4 manières suivantes, il est soit :
1) le corps
2) l'esprit
3) le corps et l'esprit mis ensemble
4) quelque chose qui existe séparément du corps et de l'esprit
1) Si le « soi » est notre corps, cela n'a aucun sens de dire « mon corps » parce que le possesseur et l'objet sont identiques et il n'y aurait pas de renaissances futures car le « soi » cesse quand le corps meurt. Si le « soi » et notre corps sont identiques alors que nous sommes capables d'avoir de la foi, de rêver, de résoudre des problèmes, etc...il s'ensuit que la chair, les os, le sang, etc, peuvent en faire autant...
2) Si le « soi » est notre esprit, cela n'a aucun sens de dire « mon esprit » parce que le possesseur et l'objet sont identiques, mais nous avons l'habitude de dire « mon esprit » lorsque nous pensons à notre esprit, cela indique clairement que notre « soi » n'est pas notre esprit. De plus, si chaque personne a plusieurs types d'esprits, telles que les 6 consciences, les esprits conceptuels et non-conceptuels, il s'ensuit que chaque personne a tout autant de « soi »...
3) Si le « soi » n'est ni notre corps, ni notre esprit, notre corps et notre esprit mis ensemble ne peuvent pas être le « soi », comment cet assemblage lui-même pourrait être notre « soi » ? Si dans un troupeau de vaches, aucun des animaux n'est un mouton, le troupeau n'est donc pas des moutons...de la même manière, notre corps et notre esprit ne peuvent pas être le « soi »...
4) Si le « soi » est quelque chose qui existe séparément du corps et de l'esprit, nous pourrions appréhender ce « soi » sans que notre corps ou notre esprit n'apparaisse, mais si nous imaginons que notre corps et notre esprit disparaissent complètement, il ne restera plus rien qui puisse être appelé le « soi »...donc, notre « soi » n'est pas séparé de notre corps et de notre esprit...
Lorsqu'en méditation, nous réalisons la « dissolution du corps et de l'esprit », là où apparaissait un « soi » existant intrinsèquement, apparaît une absence de « soi », à ne pas confondre avec le néant, et cette absence d'un « soi » existant intrinsèquement est la vacuité...
Question...
poungpo nga teun tu soumpa
Sens des cinq agrégats lors des trois temps
kètchik thamtchè tchédra tché
Dont il régit chaque instant,
kètchik tchigui dzok sangyè
Bouddha parfait en un instant,
sangyè kungyi rangchin tchang
Il a la nature de tous les bouddhas
http://chanteloube.pagesperso-orange.fr ... iti-FR.pdf
A la lecture de ce Tantra Roi Bouddhiste, le Choral des Noms de Manjushri, l'existence transcendante d'un "soi" par delà les agrégats te parait-elle plausible ?
Attention, il y a un piège !
