Le Penser créateur.

Exprimez vous sur un des thèmes présentés en faisant une réponse.
Proposez des thèmes en cliquant sur nouveau.

Modérateur : Modérateurs

Répondre
Aurore
Messages : 102
Enregistré le : 21 janv. 2005, 21:09
Localisation : Région parisienne
Contact :

Le Penser créateur.

Message par Aurore » 16 oct. 2005, 06:01

Il y aurait donc deux façons de penser. La première est rattachée au sens d'un ego, d'une personne dont l'existence dépend du temps psychologique. C'est une façon de penser conditionnée, répétitive, dont le noyau est la peur et la recherche du plaisir.

C'est un mode de penser qui n'est jamais libre, qui souffre, qui peine au sein de ses limites temporelles entre un hier et un demain. Pensée-savoir liée à une histoire, à un scénario mental dépendant de l'identification au corps.

Une pensée qui interprète, juge, compare, sépare. Une pensée toujours sur la défensive qui se croit personnelle alors qu'elle ne possède aucune créativité, aucune originalité.

Un pensée bruyante, qui fuit le silence naturel de la Conscience. Une pensée affirmative, péremptoire, arrogante, pleine de l'importance d'un illusoire penseur.

Puis, il y a cet autre mode de penser qu'on pourrait appeler un Penser créateur. Un Penser spontané qui ne se rattache plus, et cela d'une façon mystérieuse, à l'idée d'un penseur, d'une personne qui pense.

Une pensée qui naît de la vacuité silencieuse de l'Être indéfinissable, impensable que nous sommes.

Une pensée toujours neuve qui jaillit du silence, d'une façon inattendue, non intentionnelle.

Une pensée naissant du son d'un Silence omniprésent, non localisable dans l'espace et le temps.

Une pensée intemporelle, qui n'a pas de durée, qui ne se rattache à aucune croyance. C'est comme un parfum soudain qui naît du coeur pour, bientôt, retourner au silence.

Une pensée qui n'est donc pas le contraire du silence mais son expression poétique.
Une pensée-Coeur qui chante l'Innommable que nous sommes et qui est AMOUR sans objet.

Ah... Quel bonheur de rencontrer des coeurs vivants, anéantis, habités par cette pensée créatrice qui a remplacé la pensée mécanique pleine de suffisance née du sens d'un moi personnel.

Car le Moi à partir duquel naît cette pensée n'est pas un moi personnel. Il est l'Unique qui s'exprime d'une façon originale et créatrice à travers tous ses centres de manifestation que sont le corps, le coeur et le mental humains ainsi qu'à travers la Création tout entière. Car chaque chose créée vibre du son de l'Unique Incréé...

Se rencontrer à partir de ce Moi, c'est célébrer l'Être infini, impersonnel, éternel que nous sommes depuis toujours.

Un Être immense saturé de silence.

Un Être au Verbe créateur.

Le VIVANT dans nos coeurs.

Lui, le grand Amour de toute vie.

"Et le Verbe se fait chair...".
Homme, si tu es vide, l'eau jaillit de toi,
comme de la source d'éternité.
Avatar du membre
Denis
Site Admin
Site Admin
Messages : 14348
Enregistré le : 23 juil. 2004, 19:19
Localisation : Grimaud
Contact :

Message par Denis » 16 oct. 2005, 14:26

Bonjour Aurore,

Heureux de te retrouver et te lire :D

Amusant aussi de voir que quelques fois les esprits se rencontrent par delà l'espace et le temps.

Merci pour ce texte si précis et au combien beau et lumineux. Comment es tu arrivé à cet état intérieur et quels seraient les conseils et techniques que tu proposes pour accéder à cela.

En ce moment je suis plongé dans la lecture et un travail personnel sur le texte traditionnel de "la Bhakti - Le Stavacintamani de Bhattanarayana" (Publications de l'institut de civilisation Indienne - éditeur Collège de France traduit par Lilian Silburn). C'est une oeuvre extraordinaire qui parle de la voie de l'Amour qu'a connu le Kasmir entre 1000 et 1300 ans, elle a pris naissance dans le berceau du Tantrisme Kasmirien avec de grands Messieurs comme Abhinavagupta, Ksemaraja, Utpaladeva ou encore Mahesvarananda.

Il a existé une femme du nom de Lalla qui était elle aussi ivre d'Amour pour Dieu qui errait en ascète de la religion de Siva, chantant et dansant entièrement nue. Lorsqu'on lui reprochait son indécence, elle répondait que seuls sont des hommes ceux qui craignent Dieu et que vu leur nombre restreint, il ne valait guère la peine de se vêtir.

Outre, ces personnages extraordinaires qui inspirent une vie de liberté, sans forme, codes ou limites sociales, affectives… Cette voie serait une voie sans détour, directe et plus simple, celle du cœur (hrdaya) ou de la Reconnaissance de soi (pratyabhijna) dans laquelle l'amour devient prépondérant. Je trouve beaucoup de similitude entre cette voie et ce que tu écris dans le forum depuis un certain temps.

Mais cette voie demande une inspiration très forte capable de plongée le pratiquant instantanément dans l'indicible. Ce type d'inspiration, qui à mon sens, fait défaut énormément à notre monde d'aujourd'hui.

Cette voie s'appuie sur l'union de Dieu (Siva) et de son énergie (sakti) par la prise de conscience que propose vimarsa qui conduit à l'illumination Prakasa.

Tout cela pour t'exprimer que
Aurore a écrit :Une pensée qui naît de la vacuité silencieuse de l'Être indéfinissable, impensable que nous sommes.
ne me semble pas si simple que ça à réaliser.
Pour le commun des mortels, n'ayant pas trouvé en lui assez d'énergie et de sérénité pour entrer en contact avec sa nature profonde restera soumis
Aurore a écrit :dans son existence qui dépend du temps psychologique. C'est une façon de penser conditionnée, répétitive, dont le noyau est la peur et la recherche du plaisir.
Merci de ton éclairage ! :wink:

Denis
Dieu nous donne ce dont il veut qu'on se serve, pour aller vers lui.
Cours de Yoga en live et étude de textes en live avec zoom
Aurore
Messages : 102
Enregistré le : 21 janv. 2005, 21:09
Localisation : Région parisienne
Contact :

Coucou !

Message par Aurore » 16 oct. 2005, 16:40

Heureuse de te retrouver, cher Denis !
Tiens, cet été, je suis tombée sur les "chants mystiques de Lalla" du tantrisme cachemirien.... Très beau et dépouillé.

Je ne sais toujours pas pourquoi j'écris. Mais quelle joie de laisser s'exprimer le fond de son coeur ! Les écrits viennent par vagues, d'une façon totalement inattendue : dans la cuisuine, dans la salle de bains, la nuit, le jour, avant ou après un cours de yoga ! N'importe quand et n'importe où ! :D

C'est vrai et tu le sais déjà que ma vie a toujours été hantée par la soif du véritable Amour. J'ai eu, comme tout le monde, quelques histoires d'amour mais cet Amour-là qui appelait tout au fond de mon être depuis mon adolescence, je ne le sentais pas rattaché à mon histoire personnelle, celle qui me fait dire que je suis née à telle date et que je mourrai à une autre !

Alors je pourrais dire que ma vie a été d'écouter l'appel de cet Amour mystérieux, de m'y abandonner et de laisser venir ce qui vient spontanément, naturellement.

Je n'ai aucun conseil à donner, aucune technique à recommander sinon de suivre les élans de son coeur quitte à se tromper... de rester vivant dans son coeur, d'instant en instant et de répondre à l'appel de l'Amour qui y résonne immanquablement.

Car l'Amour, et je l'ai toujours senti ainsi, est la substance éternelle de notre Être, de la vie, de toute vie : animale, végétale, humaine.
Se donner à cette mystérieuse évidence est la porte ouverte à un Inconnu au-delà du mental. Un Inconnu qui se met à guider, éclairer, enseigner à partir des profondeurs du coeur.

Peut-être cette voie spontanée de l'Amour est-elle plus facilement accessible aux femmes ? Je crois sentir chez les hommes un besoin de comprendre mentalement, d'analyser, de disséquer et peut-être le risque chez eux de s'en tenir à cela, de s'y enliser... (j'ai eu moi-même ma période de lecture assidue des ouvrages de Krishnamurti qui ont assaini mon intellect assoiffé de connaissances spirituelles de toutes sortes).

Je pourrai partager, une prochaine fois, une inspiration qui est venue spontanément suite à une question qui a émergé au sortir de la salle de bains :) : "qu'est-ce qu'un mystique ?".

A la joie de te lire, de vous lire, en un échange fructueux d'être à être, en toute innocence...

Aurore.
Homme, si tu es vide, l'eau jaillit de toi,
comme de la source d'éternité.
Répondre