Odile a écrit :Peut-on dire que c'est l'ego (ahamkara, d'après le tableau) qui donne "naissance" à ces 5 tanmatra qui sont de qualité sonore, tangible, visible, gustative et olfactive ? Alors que Manas ne fait que coordonner l'ensemble des perceptions et des actions...
Oui !
Sami a écrit :Quand on regarde le tableau des Tattvas, les 3 gunas se manifestent à partir de Ahamkara - donc Buddhi n'est que sattvique puisqu'il représente l'Intelligence supérieur. Il ne peut s'entacher qu'à partir de Ahamkara (sens de l'ego).
Qu'est ce que cela veut dire "sens de l'ego" ?
Non, les gunas arrivent de bien plus haut, ils sont hors de la vision du samkhya, bien qu’ils soient la cause de la multiplicité.
Vous avez eu pour certains les explications des éléments du Samkhya à travers les plaquettes de la formation (n°4), Jean Papin en donne une très précise explication que voici :
Jean Papin a écrit : N2 : PRAKRTI
Avec Prakrti commence la série des Tattva impurs qui comprend ce que le Sâmkhya ancien appelait les huit producteurs et les seize productions, de Mahat aux cinq principes des éléments.
Prakrti est la nature, en opposition au Purusa, radicalement séparé de lui pour les partisans du Sâmkhya. Mais dans les écoles du yoga tantrique et même classique, on ne lui prête pas systématiquement ce caractère d’autonomie. Elle est pénétrée du principe et constitue l’émergence de Purusa, son aspect dynamique. Cause de la manifestation, elle est l’énergie primordiale d’où émerge l’univers, inséparable de la conscience pure.
Quand on figure au sommet de la hiérarchie, liée à Shiva, on l’assimile alors à la Shakti. Lorsqu’on la place au niveau présent d’impureté, il faut l’interpréter comme la substance germant de l’état potentiel, mais déjà reconnue en chaque être. Vue comme Shakti, elle contient la préexistance des effets et est la cause indivise du principe des Guna ; perçue comme nature particulière, elle subit l’influence des Guna et se déploie dans la création en mental et matière vivante ou physique. Son réceptacle est l’âme, le Jivâtman, le soi avec les attributs d’un être incarné.
Prâkrti ne doit pas être confondu avec ce que la science appelle matière, terme qui s’applique seulement à un des effets.
Elle est connue extérieurement par inférence et ses produits (vikrti) sont les Tattva inférieurs, de Buddhi aux principes des cinq éléments. Dans son dernier état latent, avant l’apparition des phénomènes, Prâkrti est Pradhâna, force et matière non différenciées, (a-linga) sans signe distinctif.
Par suite de la mutation du Karman et du déséquilibre des Guna, l’énergie potentielle quitte son état virtuel de stabilité et entre en vibration. Nous assistons dès lors à des modifications réelles, les Vikrti. Par exemple, la vapeur devient de l’eau, la graine devient plante, le lait devient beurre, pour ne parler que des plus grossières.
Ces productions ne présentent pas toujours un caractère de réalité. L’erreur, la confusion provenant des sens ou du mental leur attribuent une existence alors qu’il ne s’agit que de fantasmagories. A la faveur de la nuit, ou par suggestion, un buisson peut être pris pour un homme ou pour une automobile, ou une quelconque entité. Une telle méprise n’entraîne pas un changement de la nature de buisson ; mais on ne doit cependant pas nier qu’un incident a eu lieu. Les émotions qui peuvent l’accompagner en témoignent. Cette transformation trompeuse est appelée Vivarta.
Toutes ces modifications issues de Prakrti-Shakti, non compris les cinq dernières, Mahâbhûta forment le corps subtil de chaque vivant (jîva) procédant du corps causal qui est la condition non manifestée de la Prâkrti. Ces deux corps subsistent jusqu’à la délivrance spirituelle (moksa). Ils sont individuels à la fois, car l’ensemble de ces corps soutient toute la création.
Dans les systèmes dualistes (dvaita) et dualistes-non dualistes (dvaitâdvaita) les produits de Prakrti ne sont pas entièrement illusoires comme l’expriment abruptement les dualistes. Définis par les symboles, le langage et les concepts limités par notre perception partielle et trompeuse, il n’en demeure pas moins des apparences ; mais les unes sont matérialisées semblablement par les yeux de tous, les autres imaginaires et personnelles. L’énergie prend des formes diverses selon l’ordre du monde. Elle est représentation. Mais explicite ou implicite, elle reste l’expression exubérante où la virtualité de ce qui est. Elle est. Elle n’est pas. Elle est.
N3: BUDDHI OU MAHAT
Avec Buddhi nous abordons la mouvance et le foisonnement de la transmigration, Pratyabhâva. De cette intelligence qui capte encore un reflet de la pure conscience de Purusa aux cinq élémenteaux (les Mahâbhûta) vont s’étager, se croiser et se développer un nombre considérable de « mondes », états individuels ou collectifs, physiques, matériels, vitaux et psychiques de l’avant de l’après mort. Ce sont comme le disent les textes « les lieux de l’expérience affective ». Ils forment l’univers tout entier.
Intelligence cosmique, faculté de détermination, intellect, Buddhi est le Mahatattva du Samkhya ; les mots sont imprécis pour définir cet effet de pradhâna qui représente le dernier état potentiel de Prakrti, dans lequel les trois Guna sont encore en équilibre. Il s’agit d’une masse énergétique en mouvement qui va organiser le cosmos et la vie selon la loi du monde (dharma), d’un flux constant en perpétuelle turbulence, à l’inverse de Purusa, esprit statique et éternel.
Les occidentaux présentent l’intelligence comme une capacité de l’être incarné. En réalité elle est la conscience impersonnelle, exempte de sensations particulières et sans aucune différentiation issue de l’égo. Elle se place avant et engendre le « je » qui distingue. L’erreur d’une telle inversion provient de fait qu’étant le premier principe de l’évolution dans le mécanisme de sens interne, elle n’apparaît qu’à la fin de l’opération. En effet, l’intellect n’est connu que par l’expérience des objets extérieurs dont il prend l’aspect. On ne peut donc ordinairement le connaître de façon isolée. Seule la pratique yoguique le permet.
Buddhi domine toutes les catégories suivantes et les féconde. Elle contient le signe de l’évolution (linga) et de la mémoire, c’est à dire toutes les imprégnations psychiques (samskâra) ; elle conçoit et est révélée par l’égo, le mental et les sens. C’est également par l’intermédiaire de Buddhi que l’accès à l’intuition supérieure de l’être, au Purusa est possible. Alors que l’Ahamkâra, le Manas et les Indriya n’ont pas d’existence indépendante, Buddhi demeure comme conscience cosmique (Mahat), capable d’être illuminé par Purusa ; D’où son essence sattvique de luminosité et de pureté. Son organe d’élection est le cœur et non le cerveau qui est siège du mental.
Le Samkhya lui attribut les fonctions de mémoire permanente (smarana) et d’arrêt de la fluidité mentale (cînta) ; cette dernière opération s’obtient seulement par la concentration sur une des perceptions mémorisée.
La fonction Smarana fait de l’intelligence l’élément essentiel de corps subtil (sûsma sharîra) avec les Indriya, le mental et les cinq énergies vitales (prâna). Mais c’est par Manas qu’elle nous est connue. On dit que Buddhi est le conducteur du char, Manas les rênes et les Indriya sont les chevaux.
Ajoutons que cette série de Tattva se manifeste toujours sous deux formes, l’une macrocosmique, l’autre microcosmique. Ainsi, il y a un ego collectif et un ego individuel, un mental cosmique et un mental particulier à chaque vivant, une mémoire collective et une mémoire individuelle, etc… tout comme la somme des êtres incarnés (Jiva) correspond à l’Homme essentiel qui est le corps d’Ishvara.
Donc ce n'est pas Prakriti qui "bug" mais Buddhi qui est différente pour nous tous, ou du moins qui regroupe beaucoup d'éléments.
Je vois par exemple dans l'idée : "cette personne à un esprit noir" le fait que Buddhi n'est pas éclairé par purusa et reste donc dans l'ombre, ainsi toutes les expériences vécues par une personnes qui remontent à Buddhi sont "validées" d'une manière noire et cela donne un comportement adéquat.
Un jour la personne, touchée par la violence de son existence comme le décé d'une personne importante de son entourage, se met à "prier" et cela ouvre une brèche dans buddhi qui reçoit alors un peu de lumière.
La science nous montre aussi une chose sublime, c'est que si on éclaire un papier épais et noir, aucune lumière ne passe, mais si on fait on petit trou la lumière s'engouffre avec force et la quantité de lumière qui entre est énorme, la diffraction de la lumière derrière le trou donne une lumière plus forte que ce que pourrait laisser passer un trou plus gros, je vois là toute la compassion du monde...